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Par Isabella Song
• 8 sept. 2022
Directrice principale, Gestion des risques
Gestion du risque de crédit de détail, Services bancaires aux PME
Groupe Banque TD

Dans quelques jours, je partirai en congé parental pour la naissance de mon deuxième enfant. Tous les parents qui travaillent vous le diront : les jours et les semaines qui précèdent le début de ce congé peuvent susciter toutes sortes d’émotions.

L’impatience de rencontrer un nouveau petit bout de chou, la nervosité à l’idée de passer des nuits blanches et, en plus de tout ça, la crainte de ne pas réussir à tout boucler au travail avant de partir en congé. Pour beaucoup, à ce stade, l’avancement professionnel ne fait pas partie des priorités.

Mais il y a quelques mois, alors que j’avais déjà dit à mes supérieurs que je prendrais au moins une année de congé parental, j’ai posé ma candidature à une promotion, et je l’ai obtenue. De collaboratrice individuelle se consacrant à ses propres projets, je suis devenue gestionnaire de personnel dans le service Gestion des risques de la TD, à la tête d’une équipe.

C’était l’occasion que j’attendais, la suite logique de mon parcours professionnel, un objectif que je visais activement.

Et pourtant, j’ai failli y renoncer avant même que ma candidature soit prise en compte.

Pourquoi? Honnêtement, je trouvais que je n’étais pas la candidate idéale. Pas parce que je ne me sentais pas apte à assumer ces fonctions. Mais parce que j’étais enceinte.

L’exclusion volontaire

Comme bien des femmes, je voyais ce congé comme un inconvénient. Comment l’entreprise pouvait-elle me donner une promotion si je partais – pour plus d’un an – seulement trois mois plus tard?

Je me disais que si j’accédais à ce poste, ce n’était pas juste ma réussite qui entrait en ligne de compte : il y aurait toute une équipe qui dépendrait de moi. Et à peine quelques mois après mon entrée en fonction, je partirais, et ils devraient trouver quelqu’un pour me remplacer en mon absence.

Ce genre de raisonnement est l’« exclusion volontaire ». C’est le fait de penser qu’on ne devrait pas poser sa candidature à tel poste ou à telle promotion parce que ça pourrait être gênant pour les autres. C’est un thème récurrent chez les femmes qui s’apprêtent à s’absenter du travail pour s’occuper de leur famille.

Ce type de sentiment n’est qu’un des nombreux casse-tête auxquels sont confrontées les femmes qui souhaitent concilier vie de famille et développement de carrière.

Après mon premier congé parental, je manquais d’assurance à mon retour au travail. Je vivais beaucoup de « premières » : mon premier enfant, la première fois que j’en étais éloignée, la première fois que je devais gérer une famille de trois personnes, et la première fois que je revenais au travail, mais à un tout nouveau poste.

Commencer à un poste complètement différent : à quoi devais-je m’attendre? Quand j’en ai parlé à d’autres femmes qui s’apprêtaient à agrandir leur famille, je me suis rendu compte que je n’étais pas la seule à me questionner. Elles m’ont dit qu’elles préféreraient rester au même poste afin de simplifier les choses, pour elles comme pour l’entreprise. Même avant de tomber enceintes, elles pensaient que leurs équipes allaient se sentir « abandonnées » par elles.

« Que ferais-tu si tu n’étais pas enceinte? »

Donc quand le poste que je convoitais a été affiché, j’avais déjà plus ou moins décidé de ne pas postuler.

Il aura fallu attendre une rencontre de perfectionnement avec une personne parmi mes supérieurs, où celle-ci m’a parlé du poste en me demandant pourquoi je n’avais pas postulé, pour que je commence à revenir sur ma position.

Elle m’a demandé : « Que ferais-tu si tu n’étais pas enceinte? Est-ce que tu poserais ta candidature? »

J’ai répondu oui sans la moindre hésitation. Et, tout de suite, j’ai commencé à me demander pourquoi je doutais de moi-même.

Mon directeur, Callum Mair, m’a dit : « La vie de famille et le cheminement de carrière ne devraient pas s’influencer mutuellement, donc réfléchis à ce que tu souhaites sur le plan professionnel. »

Je savais que j’avais les compétences qu’il fallait pour ce poste, mais ce n’est que lorsqu’il m’a encouragée à postuler que j’ai osé le faire.

Mes supérieurs ont vu en moi ce que je ne voyais pas à ce moment-là. Ils ont balayé mes craintes. Ils m’ont aidée à réaliser que ma famille et ma carrière pouvaient grandir en parallèle. Ils comprenaient mes raisons, mais ils ne voulaient pas que je renonce à cette occasion.

J’ai donc décidé de postuler, en me disant que la direction s’occuperait du côté logistique.

Tout au long du processus, j’ai appris à quel point il était important de défendre ses intérêts, de remettre en question ses préjugés et de ne pas s’exclure volontairement des débouchés qui s’offrent à nous.

Je sais que mon cas n’est pas isolé. Avant cette histoire, je trouvais que je conciliais bien la vie professionnelle et la vie personnelle, et que j’avais un point de vue progressiste sur les femmes au travail.

Depuis de nombreuses années, je travaillais bénévolement pour le Comité des femmes dirigeantes de la TD, un groupe-ressource de soutien des femmes à tous les échelons de la Banque. Je me trouvais bien informée sur les préjugés inconscients; d’ailleurs, j’expliquais souvent à mes collègues et aux gens autour de moi comment les combattre.

Mais j’accordais trop d’importance à la perception des femmes et des congés parentaux dans la société, et pas assez à ma perception de moi-même en tant que femme et à mes aspirations de carrière. Avec le recul, je trouve que j’en ai beaucoup fait quand je suis revenue de mon premier congé, parce que je voulais prouver que j’étais capable de tout concilier.

Remettre les préjugés en question

C’est à nous tous et toutes de combattre ces préjugés. Pour faire bouger les choses, nous devons être plus proactifs, encourager nos collègues à saisir les occasions favorables à leur carrière, et soutenir et défendre les parents qui travaillent.

Il faut qu’on parle de congé parental. Il faut qu’on affiche clairement nos objectifs professionnels, même pendant la grossesse ou le congé. Il nous faut des leaders qui nous épauleront pour que règne l’influence positive. Il nous faut un environnement propice à la bienveillance. Chacun et chacune doit faire valoir ses droits, et, en parallèle, les leaders doivent faire avancer les choses. En tant qu’employeurs et employés, nous devons séparer la logistique familiale de l’avancement professionnel.

Dans quelques jours, je partirai en congé parental, avec une confiance renouvelée, et sans craindre mon futur retour au bureau. Quand je reviendrai, je sais que la TD m’offrira des conditions qui conviendront à mon équipe, et à ma famille.

En effet, parfois, le moyen le plus efficace de susciter le changement, c’est de l’incarner.

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