Cet article a été publié le 2 juin 2009.
Écrit par Mike Pedersen.
Le monde se dirige vers une économie à faibles émissions de carbone. Et il le fait à toute vitesse. Songeons par exemple aux conclusions du sommet du G20 qui s’est déroulé à Londres plus tôt cette année : les chefs d’État qui y participaient, dans leur volonté de raviver l’économie mondiale en perte de vitesse, ont aussi contribué à la réinventer.
Environ 400 milliards de dollars américains (15 % de l’enveloppe totale de relance) seront utilisés pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES). Certains pays consacrent jusqu’à 80 % du montant de leur plan de relance à des initiatives économiques vertes. Étonnamment, la Chine, qui investit 200 milliards de dollars américains, est le pays qui dépensera le plus d’argent par habitant.
Le moment où arrivent ces mesures semble bien choisi, alors que nous sommes à quelques mois à peine d’une rencontre internationale visant à remplacer le Protocole de Kyoto, traité qui régit actuellement les émissions de GES. En outre, on devine déjà un programme plus ambitieux, qui inclura vraisemblablement pour la première fois les États-Unis et des puissances émergentes comme la Chine.
Aux États-Unis, le président Barack Obama souhaite établir une bourse du carbone qui aurait une incidence tangible sur plusieurs entreprises canadiennes qui exportent vers le marché américain. Les États emboîtent aussi le pas : la Californie, entre autres États, a mis en place une réglementation stricte qui promet une réduction substantielle des émissions de gaz à effet de serre au cours des prochaines années.
L’environnement est une problématique économique, et l’économie est une préoccupation environnementale. Par conséquent, les dirigeants d’entreprise du secteur privé doivent étudier les ramifications stratégiques de cette nouvelle réalité.
Certains avancent que des mesures législatives destinées à combattre le réchauffement planétaire pourraient mener à une restructuration majeure de l’industrie et à des pertes d’emploi massives. Le secteur manufacturier pourrait aussi être touché si de nouveaux coûts sont imposés pour les activités produisant une quantité élevée de carbone et que les préférences des clients changent. De plus, étant donné l’attitude ferme du président Obama, les tarifs des échanges commerciaux entre les États-Unis et les autres pays, dont le Canada, pourraient grimper, puisque son gouvernement pénaliserait les importations de pays qui semblent ne pas en faire assez pour réduire leurs émissions.
Qui plus est, dans un régime de réglementation des émissions de carbone, plusieurs organisations verront apparaître de nouveaux coûts appréciables dans leur modèle d’affaires, coûts dont les estimations à court terme atteignent jusqu’à 50 dollars américains par tonne de GES (l’équivalent de 12 cents additionnels par litre d’essence). Mais selon la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie (TRNEE), même en imposant de telles hausses de coûts, il ne serait pas possible d’atteindre d’ici 2050 le niveau cible d’émissions établi par le gouvernement canadien. Dans un de ses rapports, la TRNEE propose d’établir un prix quatre fois plus élevé d’ici 2025 et de l’assortir de diverses autres politiques. Réfléchissez à ce qu’il adviendrait de votre entreprise si elle devait payer chaque tonne de carbone qu’elle émet, peu importe que ce soit l’un ou l’autre des prix. Il va sans dire que cela influencerait les prix à la consommation, ce qui donnerait aux consommateurs des raisons de plus de modifier leurs comportements.
Tout n’est pas sombre pour autant. De belles occasions pourraient naître de ces contraintes. Les occasions d’affaires et d’accroissement des revenus sont celles qui nous viennent naturellement en tête. Le plan de relance du G20 n’est qu’un des nombreux exemples. Par exemple, le montant consacré annuellement aux technologies environnementales est estimé à 1,3 billion de dollars américains et ne cesse de croître.
La conjoncture fournit également aux entreprises l’occasion de rehausser leur marque employeur. Une étude récente a révélé que 75 % des diplômés actuels souhaitent travailler pour une entreprise qui adopte une attitude responsable en matière d’environnement, entre autres choses. Être considérée comme une entreprise socialement responsable peut rapporter gros lorsque vient le temps de recruter et de retenir les employés les plus talentueux.
Vu ce qui précède, comment pouvons-nous préparer les organisations à ce nouveau contexte d’exploitation?
Premièrement, nous devons mettre de l’ordre chez nous. C’est la seule manière de prendre de l’avance sur les nouvelles réglementations qui seront inévitablement mises en place et qui influenceront les activités de l’entreprise; c’est aussi la seule façon de relever son niveau de conscience environnementale.
Ensuite, il est crucial que les dirigeants comprennent les conséquences stratégiques et commerciales de la protection de l’environnement pour tous leurs secteurs d’activité. Cela implique notamment, particulièrement à court terme, d’offrir des produits et des services plus verts à la clientèle.
Finalement, les organisations doivent tendre la main et établir des relations productives avec les environnementalistes et les organismes de réglementation aux niveaux fédéral, provincial et municipal.
Le train vert est en marche. Nous vivons dans un monde nouveau où l’environnement et l’économie sont inextricablement liés. Les consommateurs exigent de plus en plus que nous fassions preuve de leadership sur le plan de la protection de l’environnement, et nous serons bientôt soumis à de nouvelles règles. Notre modèle d’affaires se doit de tenir compte de ces changements. Ceux qui comprendront le mieux les risques et qui saisiront toutes les occasions qui se présentent en bénéficieront grandement.